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Forcé de vendre sa maison pour s’en sortir

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Guy Binette n’en peut plus d’attendre après ses prestations de la SAAQ. Son dossier traîne devant le Tribunal administratif du Québec et il doit maintenant se résoudre à vendre sa maison pour s’en sortir.

Un résident de Lacolle qui a perdu un œil à la suite d’un accident de moto doit se résoudre à mettre sa maison en vente à cause des délais qui n’en finissent plus dans le dossier qui l’oppose à la SAAQ devant le Tribunal administratif du Québec (TAQ).

Guy Binette ne voit plus d’autres solutions que de planter une pancarte devant la maison où il se voyait passer ses vieux jours.

«Quand on a acheté en 2005, je pensais bien vivre ici jusqu’à la fin de mes jours et eux viennent gâcher ça. Ils sacrent nos plans de vie en l’air», soupire le camionneur de carrière, âgé de 60 ans.

Les déboires de l’homme ont débuté en 1982 alors qu’il est gravement blessé à l’œil pendant qu’il circulait à moto. De graves complications qui s’étirent du début des années 2000 jusqu’à 2010 le mènent à un verdict tranchant. «On m’a dit que mon nerf optique était mort, qu’il n’y avait plus rien à faire», raconte M. Binette.

Prestations stoppées

Après avoir remporté sa première cause à la suite d’un an et demi de procédure pour adhérer au régime d’indemnisation de la SAAQ, ses prestations sont stoppées en 2015.

Représenté par l’ancien ministre de la Justice Marc Bellemare, le résident de Lacolle retourne devant le TAQ.

«Ça devait repasser le 11 janvier, mais ç’a été reporté à cause de la grève. Ça peut passer cet été, cet automne, on ne le sait pas», déplore Me Bellemare.

Abandonné par l’État

Ces délais viennent tranquillement à bout du moral de Guy Binette et de sa conjointe. Sans revenus et incapable de reprendre le travail sur la route, l’homme est à court de solutions. Il n’en revient pas que l’État puisse abandonner des gens comme lui de cette façon.

«Je n’ai pas le choix de vendre la maison. Je vais devoir faire une vente de feu pour la vendre avant de la perdre. On vit juste sur le compte de banque et le salaire de ma conjointe. On ne vit pas dans le fond, on existe et c’est tout», confie M. Binette. «S’ils continuent comme ça, il va me rester juste mon cul pis mes dents.»

Délais - Beaucoup de gens pénalisés par la grève

Les exemples de prestataires pénalisés par la grève déclenchée en octobre par les juristes de l’État sont nombreux.

En novembre dernier, Linda Michaud a vu le Tribunal annuler une décision rendue en 2012 dans son dossier et admettre qu’elle a subi un violent traumatisme crânien lors d’un accident de la route en 2004. Même si on lui accorde des prestations pour ces blessures à la tête qui l’ont rendue invalide, elle n’a toujours pas touché un sou.

«J’ai dû emprunter pour payer mon avocat et mes expertises médicales. J’ai dû déménager avec un ami pour arriver. J’ai fait tous ces efforts et malgré ça, je n’ai rien eu depuis novembre», se désole la résidente de Drummondville, représentée par Me Marc Bellemare.

Me Lucrezia Plutino s’apprêtait quant à elle à régler un dossier dans les jours suivant le 24 octobre, moment du déclenchement de la grève: le cas d’un jeune dans la vingtaine, traumatisé crânien, qui n’a plus d’indemnités depuis 2012.

«On était sur le point de régler, tout était prêt et paf, la grève tombe. Il n’a absolument rien», confie l’avocate. Tout s’est écroulé pour ce jeune alors qu’il était à un cheveu d’un dénouement. «Il avait espoir, et là tout s’arrête. Ce n’est pas vrai qu’il n’y a pas d’impacts sur les gens.»

Vives réactions

« Ça touche des citoyens qui ont le guts de contester des décisions, de se tenir debout devant le gouvernement et on n’en parle pas. On a toujours été délaissés au TAQ. »

— Me Lucrezia Plutino

« On en est à faire appel aux politiciens et aux autorités. Il y a zéro collaboration du Tribunal administratif qui aurait le pouvoir de faire procéder certains dossiers en raison des services essentiels, mais qui ne le fait pas. C’est le citoyen qui paie. »

— Me André Laporte, président de l’Association des avocats représentant les bénéficiaires des régimes d’indemnisation publics

« C’est un véritable parcours du combattant qu’on demande à ces gens. On leur demande de prendre leur mal en patience, mais pendant ce temps, leurs droits sont bafoués et leurs traitements sont retardés. Le gouvernement retarde leur processus de guérison. »

— Arlène Gaudreault, présidente de l’Association québécoise Plaidoyer-Victimes

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